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27 mars 2002 3 27 /03 /mars /2002 07:42
La remontée vers la Martinique

Nous repassons par Bequia

La remontée de Canouan à Bequia se fait à l’allure de près ou plutôt de l’a peu près. Il y a bien longtemps que nous avons perdu l’habitude de naviguer au près, en tapant dans les vagues, en recevant des paquets d’eau déferlant sur le pont, en étant secoués comme des mirabelliers. De plus, nous sommes accueillis à Bequia par un grain et des vents de 30 nœuds. Heureusement l’eau est chaude et le soleil sèche tout rapidement.

Après une dizaine de jours dans des mouillages plus ou moins déserts, nous sommes heureux d’arriver dans une petite ville et nous nous précipitons dans un cybercafé pour lire nos couriels comme disent les Québécois rencontrés au cours de notre voyage.  Recevoir des  nouvelles de la famille, des autres navigateurs et des collègues de travail nous fait toujours grand plaisir.

Tous les amis rencontrés de l’autre coté de l’Atlantique, avec qui nous avons fait un bout de chemin entre l’Espagne et les  îles du Cap Vert, nous manquent un peu. Quand les bateaux arrivent dans les Caraïbes, ils se dispersent. Certains montent vers le nord, d’autre vont vers le sud. Il n’y a plus qu’Internet qui maintient le lien.

Et par Saint-Vincent

Nous nous arrêtons à Cumberland bay sur l’île de Saint-Vincent. Cette anse ressemble beaucoup à Wallilabou bay mais elle est moins fréquentée. Sur la plage on trouve seulement un petit restaurant, le Ben-I’s, qui ouvre occasionnellement quand il y a des clients. Le restaurant de M. Stephens vanté par tous les guides est fermé. Il n’est plus en activité depuis longtemps nous explique Stanley, un grand gaillard qui vend des fruits.

Nous ne sommes que quatre ou cinq bateaux à passer la nuit à cet endroit. Le mouillage est bahamien comme à Wallilabou, sur ancre à l’avant et avec un bout à l’arrière, porté à terre par un local à l’aide d’une barque.

Le paysage est superbe. Une cocoteraie borde la plage de sable noir. Une petite vallée prolonge la baie. Elle est encaissée entre des montagnes couvertes d’une végétation dense. Il pleut régulièrement sur l’île. Tout est bien vert.

Les habitants de Cumberland sont très avenants. Un d’entre eux, agenouillé sur une vielle planche à voile qu’il fait avancer en ramant avec une branche de cocotier, vient jusqu’à notre bateau pour nous proposer sa récolte de fruits. On fait provision de pamplemousses, de citrons et de papayes pour un prix dérisoire. Les fruits poussent facilement sur Saint-Vincent et ils ne sont pas toujours récoltés. Certains pourrissent sur les arbres. En nous promenant, nous apercevons un élevage de chèvres nourries avec des régimes de bananes qu’elles croquent sans éplucher la peau.

Un petit cours d’eau débouche dans la baie. Il est profond de seulement trente à cinquante centimètres et nous nous amusons à le remonter sur quelques centaines de mètres. Cela fait du bien de tremper les pieds dans de l’eau douce et fraîche.

Soufrière bay sur Sainte-Lucie

Pour rejoindre Soufrière bay nous traversons au près le canal venté séparant Saint-Vincent de Sainte-Lucie. Le bateau avance bien, entre 6 et 7 nœuds. Nous dépassons les deux Pitons, qui sont deux petites montagnes remarquables au sud de Sainte-Lucie et entrons au fond de la baie, vers le village de La Soufrière. Le mouillage ici aussi est bermudien car les fonds remontent très vite. On ancre par dix mètres de fond à moins de vingt mètres de la plage.

La zone des Pitons et de La Soufrière est un parc marin protégé. Deux gardes en uniforme viennent me réclamer 40 dollars EC de taxe. Je trouve cela cher et négocie. Ils baissent le prix à 30 dollars EC, mais sans me donner de reçu. Il est certain que mes dollars n’alimenteront pas le programme de protection des récifs.

Après leur départ, je lis la brochure du parc marin et constate que la taxe s’applique quand on utilise les bouées installées dans les zones protégées. Si comme moi, on mouille sur ancre hors de ces zones, il n’y a pas lieu d’appliquer la taxe. Les deux raquetteurs officiels en uniforme se font de l’argent de poche facilement alors que les boat boys qui aident les plaisanciers à accoster pour 10 dollars EC sont moins bien rémunérés. C’est dommage.
Depuis le bateau nous contemplons le paysage magnifique de la baie. Aujourd’hui c’est dimanche et la plage de sable noir est très fréquentée. Des familles pique-niquent, des enfants jouent au ballon. En fin de soirée, elle redevient déserte et nous assistons à un beau coucher de soleil sur une mer sans nuages.

Rodney bay. Super ! il y a une marina

Nous ne restons qu’une nuit à Soufrière bay et rejoignons Rodney bay au nord de Sainte-Lucie. Le trajet s’effectue surtout au moteur, sous le vent de l’île. Nous apercevons au loin l’île de la Martinique.

Il est possible de mouiller sur ancre dans Rodney bay qui est une anse bien protégée de la houle. Mais au fond de la baie il y a une grande marina nichée dans un lagon. On y accède par un chenal profond de 4 mètres environ.

Harmonie depuis plus de deux mois n’a fréquenté que des mouillages et a traversé l’Atlantique. Tout est donc salé à bord ! Une marina, cela veut dire la possibilité de laver le bateau à l’eau douce avec un jet, d’enlever la couche de sel qui imprègne la coque, le pont, les cordages, les poulies. Une marina c’est aussi pouvoir se brancher au 220 volts et recharger complètement les batteries. Nous n’hésitons pas et entrons dans le lagon pour nous amarrer à un quai en béton avec eau et électricité. Cela fait du bien d’utiliser l’eau douce sans la rationner.

Les formalités de clearance sont expédiées rapidement ce qui nous laisse le temps d’une promenade dans le village de Gros Ilet. Il est formé de cases en bois. Il y a beaucoup de petites buvettes dans les rues. On en trouve  presque tous les vingt mètres avec à chaque fois des clients, une bouteille de bière à la main. Des poules et des coqs vadrouillent sur les trottoirs et dans les caniveaux. Il y a aussi quelques magasins et une jolie église.


La Martinique

Nous arrivons en France après cinq heures de navigation

Nous restons deux jours à Rodney Marina puis décidons de rejoindre le port du Marin. Le canal entre Sainte-Lucie et la Martinique est venté. Il nous faut à peine cinq heures de navigation pour atteindre la baie du Marin. Nous sommes à nouveau en France, après avoir quitté Brest il y a cinq mois ! 

Des centaines de bateaux sont au mouillage. Nous repérons aussitôt deux voiliers jaunes. Nous nous approchons. Et si c’était Mars et Basta ? Oui ce sont eux ! On jette l’ancre à proximité.

Une question très importante se pose tout de suite. Sur quel bateau fête-t-on les retrouvailles ? Sur Harmonie. La dernière fois c’était sur Basta et la fois d’avant sur Mars à Tarrafal au Cap Vert. On se raconte nos traversées de l’Atlantique, les joies et les difficultés. On s’échange des nouvelles sur les bateaux amis rencontrés en chemin.

On se fait peur rétrospectivement en relatant l’histoire du plaisancier allemand qui s’est fait dévorer par un requin tigre de 5 à 6 mètres de long. Cela s’est passé dans une des îles du Cap Vert en décembre, à l’époque où nous y étions. Le plaisancier se baignait autour du bateau qu’il avait loué. Il a été attaqué sous les yeux de sa femme. Le requin l’a projeté en l’air et lui a déchiqueté une jambe et un bras. Le skipper du bateau a pu le remonter à bord, mais le plaisancier allemand est rapidement décédé en perdant tout son sang. Cela aurait pu nous arriver. Olivier, de Mars, se souvient du requin qu’il a aperçu rodant autour de nous quand nous avons plongé et chassé ensemble sur l’île de Sal.

Le lendemain, dans les rues du Marin, nous rencontrons Jean-Louis du bateau Jucunditas de Saint-Malo. Nous l’avons connu à Porto-Santo. On a aussi plein de choses à se raconter. D’accord pour un dîner ce soir sur son bateau. La soirée se termine tard. On convient d’organiser une plongée prochainement. Nous profiterons du gonfleur que Jean Louis possède à son bord pour recharger les bouteilles d’air comprimé.

Le Marin est vraiment un lieu de passage obligé. On y revoit tous les bateaux rencontrés au cours des mois précédents. Nous retrouvons ainsi l’équipage de Myrielle qui a traversé l’Atlantique en janvier.

On est content de se retrouver en territoire français après cinq mois passés à l’étranger, heureux d’entendre parler français et de retrouver les produits français dans les magasins.

Le Marin est un port bien équipé avec des chantiers nautiques et tous les commerces liés à la plaisance. Je songe à équiper Harmonie d’une éolienne pour mieux recharger ses batteries. Je fais faire des devis. Ils mettent du temps à arriver. Ici, il ne faut pas être pressé. C’est la France tropicale. Quant aux prix, ils sont majorés de taxes d’importation comme l’octroi de mer. Je laisse passer quelques jours de réflexion et décide de différer l’investissement.

La famille est réunie

Nous retrouvons Ludovic qui est très content de son périple de Saint-Vincent à la Martinique en passant par Sainte-Lucie. Il a eu le temps de découvrir, pendant quinze jours, l’intérieur des trois îles et de faire des rencontres intéressantes. Il est monté au sommet de la Montagne Pelée. L’accueil a été excellent partout où il est passé et le bateau stop entre les îles a bien fonctionné. 

Nous accueillons aussi son frère Thomas, le webmaster, avec son amie Virginie qui débarquent de l’hiver grenoblois pour passer une dizaine de jours avec nous.

Tous ensemble, nous mettons le cap sur Sainte-Anne pour plonger en apnée sur les cayes.  Ensuite nous faisons route, plein vent arrière, vers les Anses d’Arlet ou nous séjournons quelques jours. Thomas et Virginie découvrent les beautés du monde sous-marin en plongeant pour la première fois avec des bouteilles d’air comprimé.

Nous passons une grande partie du temps dans l’eau. Tantôt nous explorons la côte, tantôt nous chassons les poissons des récifs.

Les jours s’écoulent rapidement. Ludovic, enchanté de son séjour d’un mois dans les Antilles repart pour le Canada.

Thomas et Virginie décident, à leur tour, d’escalader la Montagne Pelée. Ils quittent le bateau pendant deux jours pour rejoindre la région du Morne Rouge au nord de la Martinique. Ils font eux aussi des rencontres intéressantes, logent chez l’habitant et découvrent des personnages originaux.

Pendant leur absence nous organisons des parties de chasse avec nos amis de Mars et de Womcoco qui sont arrivés dans les Anses d’Arlet.

Mais déjà la fin des vacances approche pour Thomas et Virginie. Nous retournons à Sainte-Anne, pour plonger une dernière fois sur les cayes, puis au Marin pour louer une voiture et faire un petit tour sur les routes de Martinique avant de rejoindre l’aéroport.

Nous visitons le Jardin de Balata qui rassemble les plus belles espèces de fleurs et d’arbres des régions tropicales. Nous continuons ensuite vers le nord pour admirer une cascade, le Saut du gendarme.

En revenant sur nos pas, nous dénichons un restaurant, situé au centre de l’île, le Yathoantsa qui offre une vue superbe à la fois sur la mer Caraïbe et sur l’océan Atlantique. Les patrons sont très accueillants et leur cuisine est de qualité.

La journée se termine par la visite de la côte Est de l’île. Nous longeons la presqu’île de la Caravelle, la baie du Robert et celle du François avant de rallier l’aéroport du Lamentin. L’heure est venue pour Thomas et Virginie de rentrer en métropole. Nous ne nous reverrons probablement pas avant quelques mois. Séquence émotion.

Nous restons au Marin deux jours supplémentaires pour faire les pleins de gasoil et d’eau et aussi pour effectuer des travaux d’entretien du bateau : nettoyage, vidange d’huile, vidange du liquide de refroidissement, changement des filtres.

 

Au revoir les amis

Ensuite nous retournons au mouillage de Sainte-Anne puis de l’Anse noire pour passer à nouveau quelques jours avec les équipages de Mars et de Womcoco. Nos routes vont se séparer. Eux restent aux Antilles alors que nous rentrons en Europe avant l’été. Des apéros et des repas sont organisés sur les bateaux. Il est toujours difficile de quitter des amis avec qui nous cheminons depuis plusieurs mois. Une page de notre voyage est tournée. Cette page a été sympathique grâce à Isabelle, Olivier, Mathieu, Arnaud de Mars et à Isabelle, Patrick, Maelys de Womcoco et aussi grâce à tous les autres navigateurs qui sont montés à notre bord et ont signé le livre d’or d’Harmonie. Nous continuerons à correspondre par e-mail. Bonne route à vous !

 Womcoco

 Mars

Saint-Pierre

Avant d’entreprendre la traversée vers la Dominique, nous faisons une escale deux jours à Saint-Pierre. Cette ville est marquée à jamais par l’irruption de la Montagne Pelée qui l’a anéantie le 8 mai 1902.

Il ne subsiste, de l’ancienne ville, que quelques pans de murs calcinés. Les maisons de la ville actuelle ont été reconstruites sur les décombres après que le volcan se soit calmé.

Saint-Pierre, ancienne capitale de la Martinique, n’a jamais retrouvé sa splendeur d’antan. Elle comptait 30000 habitants qui sont morts dans le cataclysme. Aujourd’hui, c’est un bourg de 6000 habitants, paisible bien que touristique.

Deux petits musées désuets présentent des photos de la ville d’avant 1902 et quelques objets retrouvés dans les ruines. Vu l’importance de la tragédie, je m’attendais à ce qu’ils donnent plus d’explications sur les circonstances de l’irruption volcanique et sur le déroulement des faits. Ils ne me semblent pas à la hauteur de l’événement.

De nombreux bateaux de commerce ont coulé dans la baie de Saint-Pierre le jour de la catastrophe. Il reste une dizaine d’épaves gisant entre 10 et 50 mètres de profondeur. On peut les visiter avec un équipement de plongée. Les musées n’en parlent même pas. Ce sont les centres de plongée qui donnent des explications sur le type, la nationalité et le nom des bateaux.

En quittant Saint-Pierre, nous avons la chance d’admirer, depuis la mer, la redoutable Montagne Pelée sous un soleil resplendissant. Son sommet, souvent couvert par les nuages, est complètement dégagé lors de notre passage. J’espère qu’il est définitivement endormi.

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  • : Voyage en bateau, de ports en ports. "Le voyage pour moi, ce n'est pas arriver, c'est partir. C'est l'imprévu de la prochaine escale, c'est le désir jamais comblé de connaître sans cesse autre chose, c'est demain, éternellement demain." (Roland Dorgelès)
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